23 novembre 2008

Pour Yan et Antoine

Et à ceux qui n'aiment pas la poésie et/ou MA poésie, eh bien, vous reviendrez dans deux ou trois jours, je vous les raconterai, mes histoires. Mais aujourd'hui c'est dimanche, et le dimanche, moi j'ai besoin de mots un peu plus endimanchés, voilà.


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Moment de ce qu’on appelle le bonheur mais pour lequel je cherche toujours un nom –comme un feu qui prend au ventre et remonte jusqu’à la tête, jusqu’à lui faire croire que dehors est la lumière alors que non, aujourd’hui n’est que – pluie, livres éparpillés, couette froissée, bas de laine trop grands, bol de café fumant, appartement mal chauffé, octobre qui tombe – justement – aujourd’hui n’est que tout cela et enfin, je crois que je saurai m’en contenter, peu importe comment il se nomme – bonheur? Peut-être.


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les toits d’église des paroisses vides des jeunes appuyés aux graffitis des cigarettes aux becs le cœur au bord des lèvres le mal de vivre qu’ils voudraient voir disparaître avec le train de marchandises sur les rails où ils vont négocier leur vie tous les samedis voir ce qu’on serait prêt à leur donner pour

les fils électriques entrecroisés sur les ciels gris d’été qui tardent des chaleurs retenues les jupes en jeans au-dessus des genoux qui portent les ecchymoses d’une randonnée à vélo sur les chemins de terre interdits raison de plus pour y aller si ce n’est la seule – défendu de passage – et c’est souvent derrière cette clôture juste là que –

la vie


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dire au revoir c’est le seul geste qu’il me reste tu vois cette main pâle sur un ciel couleur sable cette main qui murmure va t’en sur le même ton que celle qui aurait exigé fais-moi l’amour maintenant


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le souffle et si nous le reprenions quand bon nous semble si la liberté était là dans l’absence de points et de césures que l’espace pour respirer c’était à nous de le créer – peut-être que sous nos pieds la terre paraîtrait enfin plus légère

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Rien n’est certain, tu sais, même ces nuages que tu crois pouvoir toucher, des fils de coton fraîchement cueillis au champ qui s’effilochent comme des fromages trop salés, ces nuages que tu crois pouvoir goutter, tu auras beau tendre la langue tu attendras longtemps avant de sentir sur elle le froid acidulé des gouttelettes, rien n’est certain, tu sais, il ne faut pas croire tout ce que les dames chiquement habillées bafouillent au journal télévisé – si elles disaient vrai, à tout coup, elles porteraient de grands chapeaux, toujours, pour se protéger des malheurs qu’elles envisagent – les désastres ne sont pas à prévoir


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tout attend sans qu’il n’y ait de raison, tu sais, pour certains de savoir qu’il y a une fin cela suffit et ils se laissent porter par le vent la lumière qui passe du gris au jaune le matin qui devient soir le vent encore le vent le vent emporte et les nuages restent là toujours, suspendus, tout attend, tout n’est jamais sûr de vraiment vouloir tomber



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à l’arbre les feuilles accrochées sont encore vertes comme lors de ton départ en août rien du temps n’a changé quoi que ce soit à l’intensité des couleurs, ce vert qui n’a pourtant rien à voir avec l’espoir – je sais que tu ne reviendras pas – mais j’ignore quand enfin l’arbre, lui, se décidera à te laisser partir, chacune de ses feuilles – une image de toi que le froid n’arrive pas à brûler


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parmi les feuilles d’octobre occupées à se décomposer sur les trottoirs qui n’avaient pourtant pas besoin de morts supplémentaires pour entretenir leur grisaille – déjà tous ces passants désabusés qui les piétinent chaque jour au rythme d’un requiem – tombé d’un arbre ou des mains d’un ivrogne, du verre brisé qui reluit au soleil comme une invitation à tout ouvrir – les fenêtres pour les plus optimistes, les veines pour ceux qui n’attendaient que ce signe pour procéder à la disparition

10 commentaires:

Anonyme a dit…

Oh! C'est ici qu'elle se cache Sophie B.! Très beau texte!

Anonyme a dit…

Hé bien wow!
Vraiment de belles tournures de phrases. C'est bien que les dimanches existent!

Mélissa Verreault a dit…

Merci les mecs! Lhiverakhartoum, bienvenue chez moi! Eh oui, tu m'as trouvée ;) J'espère que tu prendras le temps d'enlever ton manteau et de rester un peu...

volage a dit…

''cette main qui murmure va t’en sur le même ton que celle qui aurait exigé fais-moi l’amour maintenant''

C'est mon kick de ce billet!

YsoboY a dit…

je n'ai pas envie de jouer le jeu du rythme effréné du web 2.0

Donc je laisse simplement un petit commentaire sans but. Voilà c'est fait. puis je prend mon temps avant de revenir plus tard pour en discuter.

(ok ok, je craque, petit "trailer" du commentaire à venir: la poïétique du passage du ver à la prose dans la poétique
de Sophie B. Nota Bene: l'auteur se laisse le droit au changement de sujet sans préavis)

Mélissa Verreault a dit…

Ma foi Ysoboy, on dirait que tu vas me pondre un mémoire de maîtrise complet sur ma poétique, ça me gêne presque! Faut pas te donner tant de mal! Mais merci de prendre la chose à coeur et d'y réfléchir sincèrement...

Après tout, ces poèmes t'étaient en partie dédiés :)

YsoboY a dit…

non quand même pas, j'en ai déjà un à écrire, ça me suffit pour l'instant.(et, le nota bene me laisse une marge de manoeuvre si jamais mes commentaires ne sont pas de même nature)

marie a dit…

Qui es-tu Sophie B?
Tu ne te trompes pas sur la personne.
Et moi, je suis toujours dans le néant.

marie a dit…

Sophie B.
Tu t'es trompée de Marie. :)
On se croisera mercredi soir!

Cindy a dit…

j'aime de plus en plus les dimanches!