02 octobre 2009

Le bruit du sel cassé

J'ai rencontré quelqu'un. De manière complètement inattendue et inespérée, comme un roman de Réjean Ducharme, oui, comme un autobus qui passe à l'avance par un froid de canard, comme un remboursement d'impôt déposé directement dans notre compte alors que le comptable nous avait plutôt dit que nous devions de l'argent au gouvernement cette année, comme toutes ces choses improbables, j'ai rencontré quelqu'un. Quelqu'un en qui j'ai envie d'avoir confiance, quelqu'un qui ne me traite pas comme une traînée, ni comme une petite fille, ni comme un tas de merde.

Nous n'en sommes qu'à des balbutiements de relation, tout ça est encore très jeune, très frais, très fragile aussi probablement, mais comme la façon dont les choses commencent avec une personne est généralement très représentative de la tangente que risquent de prendre nos rapports avec celle-ci, j'ai grand espoir que tout ce bonheur et cette facilité perdurent. Vraiment, tout cela arrive juste à point, car j'étais sur le bord de devenir cynique et désillusionnée, moi qui exècre pourtant les pessimistes désabusés. Je me réconcilie donc peu à peu avec la gent masculine, grâce à l'un de leur digne représentant, que je nommerai ici F., et qui a su me prouver que le trou-de-cuisme n'était pas une caractéristique commune à tous les hommes, que certains avaient réussi à échapper à la malédiction du salaud à leur naissance.

F. m'a invitée à souper chez lui hier. J'ai été reçue avec les mêmes honneurs que ceux auxquels doit avoir droit la princesse de Monaco lorsqu'elle rend visite à la gouverneure générale du Canada - bon, ça n'arrive probablement pas si souvent, mais justement, moi non plus, ça ne m'est pas arrivé souvent qu'un homme me convie à partager sa table d'une façon si raffinée et délicate! Tartare et mousseux un soir de semaine, il n'y avait rien de trop beau pour F. le romantique. Plus que toutes ces saveurs délectables qu'il a su mettre dans mon assiette, mon plus grand plaisir fut en fait de le regarder cuisiner avec soin et minutie. Sa manière de faire craquer le sel de mer entre ses doigts, pour ensuite le saupoudrer au-dessus de la chair de poisson crue... Ce son, fin et transparent, j'ignore pourquoi, il m'a réconfortée.

Plus aucune musique ne saurait remplacer à mes oreilles le bruit du sel cassé entre les doigts de F.

12 commentaires:

Anonyme a dit…

Moi aussi, j'ai envie de croire que les hommes ne sont pas tous des trou-du-cul!

Mélissa Verreault a dit…

Chère anonyme, je te souhaite de rencontrer, toi aussi, un homme qui te fera oublier la connerie de tous les autres. En fait, je m'en doutais déjà un peu mais cela s'est confirmé: l'homme idéal ne se trouve pas là où on le cherche généralement. On se le fait répéter souvent, mais il n'y a rien de plus vrai: il faut sortir de nos patterns pour pouvoir dénicher quelqu'un qui nous convienne réellement.

Les non trou-du-cul se tiennent loin des patterns; ils se cachent dans des lieux insoupçonnés, probablement pour éviter qu'on ne se rue toutes sur eux!

Pierre-Marc Drouin a dit…

@Anonyme
Nous sommes tous le salaud de quelqu'un. Et cela implique que nous sommes également tous le prince charmant d'un autre.
@Sophie B.
Sincèrement heureux pour toi, en espérant qu'il craquera du sel jusque dans tes rêves.

Miroir a dit…

F. est l'homme qui te fera oublier la connerie de tous les autres, mais toi, sauras-tu lui faire croire que tu le vaux bien? À lire tes patterns homme/femme, il y a lieu de se poser la question.

Mélissa Verreault a dit…

@ Miroir: t'es en train de me dire que je ne mérite pas de sortir avec un gars bien? Hmm... J'aurais envie de t'envoyer gentiment chier, mais je vais me retenir puisque de toute façon, il faudrait se rappeler une chose: ce blogue s'inspire de la réalité vécue mais s'amuse aussi à en inventer, de la réalité...

Hope-Folly a dit…

On le verra, à ton bash samedi?

Anna a dit…

oui oui je veux y croire moi aussi.

Mélissa Verreault a dit…

@ Hope-Folly: oh oui que vous allez le voir à mon bash samedi! :D En plus, c'est son anniversaire à lui ce jour-là, tu pourras même lui faire la bise de bonne fête!

@ Princesse Anna: je te souhaite sincèrement de rencontrer quelqu'un d'aussi extraordinaire que F. My god, chaque jour il me surprend de manière plus qu'agréable...

Michel a dit…

Les mains vides à nouveau car bientôt résonnera le bruit des attentes déçues écrasées par ces doigts qui, pourtant, brisait le sel avec tant d'élégance, qui aurait dit qu'il pouvait aussi, fracasser un coeur.

J'ai lu quelques uns de vos billets, le masculin semble poser à la fois problème et désir.
On passe du constat de trou du cul à celui de prince charmant, dans un mouvement de va et vient incessant, tout en occupant toujours la place de victime innocente.

Mais au bout, il y a beaucoup de mépris envers le masculin. Je m'évertue à la dire dans un blog, Corneau l'a dit aussi dans son livre l'Amour en Guerre, le masculin et le féminin arrive difficilement à réinventer une nouvelle façon d'être en relation.

Elles sont rares les femmes sereines dans leurs attentes, elles sont plutôt craintives voir même vindicatives.

Il est triste ce désir d'être en relation qui se vit tout en douleur.

Michel a dit…

J'oubliais...vous écrivez fort bien.

Mélissa Verreault a dit…

Merci pour le compliment, monsieur un gars.

En ce qui concerne votre commentaire quant aux relations homme-femme problématiques que je mets ici en scène, je le répète, il ne faut pas oublier que c'est justement une mise en scène, une exacerbation du réel. J'ose espérer que je vis mes relations interpersonnelles de manière un peu plus saine que Sophie B., qui n'est qu'un personnage. J'y mets beaucoup de moi-même, certes, mais il faut voir cela comme une saine catharsis, l'occasion de me défouler, d'explorer les limites de la personnalité humaine, etc., et non pas comme un reflet intact de ce que je vis réellement.

Cela dit, je pense comme vous que les hommes et les femmes ont plus que jamais de la difficulté à se rejoindre, à se parler et à se comprendre, et tant mieux si mes fictions peuvent en aider certains à prendre conscience de la chose et, éventuellement, à trouver leur manière toute personnelle de remédier à cette triste situation.

Aurélie a dit…

Moi, tu m'aides à prendre conscience de bien des choses! À te dire, ça donne encore espoir. :)