15 juillet 2009

Guide du parfait petit désastre – PART III – THE END

L’hôpital était étrangement calme quand Nate et moi y sommes débarqués. La salle d’urgence était anormalement silencieuse. Le genre de silence qui vous donne mal au ventre. Une vieille dame roupillait, la tête appuyée sur son voisin, lequel ne rouspétait pas; il se contentait de compter sur ses doigts. À l’infini, il comptait sur ses doigts. Partait du pouce, remontait jusqu’à l’auriculaire, changeait de main, même manège, puis recommençait. Certains diront qu’il n’avait pas toute sa tête, moi je le trouvais zen. Des fois, j’aimerais ne pas avoir toute ma tête. Me semble qu’avec la moitié d’une, déjà, j’aurais suffisamment de problèmes.

À peine le gardien de sécurité lui avait-il donné un numéro et demandé d’attendre sagement sur un des strapontins que déjà, la dame du triage convoquait Nate à son poste. Nate a essayé tant bien que mal de lui expliquer quel bon vent l’amenait, mais il avait vraiment de la difficulté à respirer et, par le fait même, à articuler. Qui plus est, la boutch obèse censée faire preuve de compassion à son égard ne faisait que répéter Je ne parle pas anglais. No english. Je suis arrivée à la rescousse, non sans lancer un regard plein de mépris à celle qui aurait dû devenir boss boy au Drugstore au lieu de faire une technique en soins infirmiers. Quand la sexy et féminine Jocelyne a fini par comprendre ce dont Nate souffrait, elle a décidé de faire de lui un cas prioritaire, de le pousser derrière une porte battante et de l’envoyer se perdre dans les couloirs labyrinthiques du pavillon Deschamps, sans m’expliquer ce qui se passait.

J’ai attendu 1h30 toute seule dans la bucolique salle d’attente, jusqu’à ce qu’un médecin vienne m’avertir qu’ils allaient garder Nate pour la nuit, par mesure préventive, mais que tout était rentré dans l’ordre.

- Vous êtes sa sœur?
- Non. Vous trouvez vraiment qu’on se ressemble?
- Je ne sais pas. Sa copine?
- Non, encore moins. Il voudrait bien que je le sois je pense mais moi j’essaie de me débarrasser de lui. Cette petite crise d’asthme aiguë est arrivée juste au bon moment.
- …
- Ok, j’aurais pas dû dire ça. Euh… est-ce que je peux aller le voir à sa chambre?
- Je ne suis pas sûr que je devrais vous laisser faire, mais oui. Voici le numéro. Ça se peut que vous le trouviez un peu étrange, on lui a donné des calmants. Si jamais j’apprends qu’il est mort étouffé durant son sommeil, je n’hésiterai pas à mettre la police à vos trousses.
- !!!
- Je blague.
- J’ignorais que les urgentologues avaient le sens de l’humour.
- Ça nous arrive. Entre deux mognons pissant le sang et trois crises cardiaques, ça nous fait du bien une p’tite joke de bébé mort, savez.
- J’imagine.
- En passant, vous ne lui ressemblez pas du tout. Vous êtes définitivement plus jolie que lui. Bonne nuit!
- Euh... Aussi… Mer… Vous… Merci?!

Après cette discussion légèrement surréaliste, après avoir emprunté quatre fois le mauvais corridor, après m’être enfargée dans les béquilles d’un vieillard endormi sur une civière, après avoir failli me péter le crâne contre le béton des murs et après avoir eu presque moi-même besoin de passer par l’urgence pour soigner mes blessures, j’ai fini par atteindre la chambre de Nate, que j’ai trouvé, effectivement, dans un état particulièrement ... comateux.

- Honey! I’m soooo glad to see you, beautiful. Oh, mâ petite chirui. Come tou est jouli.
- Tu parles français maintenant toi?!
- Francès? French? Me? No! I just think you are sooooo wonderful.
- Yeah right. You’re just sooo freaked out! You need to sleep. I’ll go. I’ll be back tomorrow morning, ok?
- No, no, no! I need you!
- You don’t. You think you do, but you don’t.
- Why didn’t you want to marry me?
- Huh?
- Earlier tonight, I asked you. You didn’t answer. Now tell me: you don’t want to be my wife, is that it?
- Ok. I officially must go. Good night Nate.

J’ai cru entendre Nate sangloter quand j’ai refermé la porte, mais peut-être qu’il riait aussi, dur à dire, il était tellement défoncé. Je venais de lui promettre que j’allais venir le chercher le lendemain matin, mais j’avais profondément envie de ne plus jamais remettre les pieds ici, de le laisser se démerder tout seul et de faire comme s’il n’avait jamais existé. J’avais bien pris soin, avant de quitter mon appartement, de récupérer le sac de Nate, pour ne pas que ça devienne une excuse lui octroyant le droit de se présenter à nouveau chez moi.

Dans la cage d’escaliers, fatiguée, épuisée, vidée, je me tenais après la rampe, pour être sûre de ne pas m’effondrer. Je ne regardais pas vraiment où je m’en allais, je ne faisais que suivre la direction indiquée par la rampe, ma nouvelle meilleure amie. Ce qui devait arriver arriva : j’ai foncé dans un médecin pressé qui dévalait les marches deux par deux, impatient de rejoindre le rez-de-chaussée, tandis que moi, je montais, je montais, j’escaladais ces marches une à une en maudissant celui qui avait décidé de mettre des chambres au quarante-cinquième sous-sol. Je fus légèrement sonnée par cet accrochage. J’ai vu flou pendant un instant. La main sur le front, les yeux qui essayaient de faire le focus, j’ai fini par être en mesure de voir clair. Mais je veux dire voir vraiment clair. À ce moment très précis, j’ai compris que le destin existait peut-être finalement.

La blouse blanche dans laquelle je venais de m’étamper la face, c’était celle du Docteur Dinkelmann.

4 commentaires:

Anonyme a dit…

Encore! J'en veux encore! Que se passe-t-il avec le séduisant médecin?

Menstrumentale a dit…

Mais je le connais ton doc.
et son nom commence par GU......
Accent anglais, d'ottawah.
Je me trompe?

Mélissa Verreault a dit…

Menstrumentale, dis-donc, tu le connais bien ce doc?! Parce qu'effectivement, son vrai nom commence par Gu... Je l'ai modifié afin de garder son anonymat mais...


Que peux-tu me dire à son sujet!? Je suis totalement intriguée!

Menstrumentale a dit…

Coucou.
Dr Dinkelmann est un résident en plastie. Son but est de faire de la chirurgie plastique ex, refaire des lolos.
Il sort avec une doc en perinat, il vient d'ottawa. Il a un band ultra poche.
Je l'ai cotoyé car j'ai deja travaillé en sa compagnie.
Au début a son arrivé, il etait adorable. Maintenant, il n'est qu'une tête enflée...

Et il est effectivement cute, au début je le trouvais super sympathique, mais cela a bien changé. Heureusement qu'il l'est avec les patientes...

J'espere t'avoir renseignée au maximum!
:-)